Troisième
Ils m'énervent.
En rentrant, vendredi à 16 heures dans ma salle pour mon ultime cours de la semaine, je trouve des craies à moitié piétinées en vrac par terre.
Or, les troisième avaient eu cours là et ils adorent jouer avec les craies (abus de langage : certains troisième adorent-pas tous).
Je déteste.
Selon les gens qui nettoient, ma classe est l'une des plus propres du collège (mais je ne sais pas s'ils disent cela pour m'être agréable ou si c'est vrai).
Maîtrisant ma rage, je fais dignement cours aux quatrième, en essayant de ne pas faire peser sur eux le piods de cette colère. Puis, en fin de cours, je bloque la sorte des troisième (petit établissement, et je suis près de la sortie) et je demande à ceux qui je chope de nettoyer rapidement la salle, sinon j'en informe le directeur, qui, en pleine crise d'autorité, va sûrement coller ou exclure.
Réactions :
- Ahhhhh!
-Mais c'est pas moi, madame!
- C'est pas nous!!!
- c'est dégueulasse!
- Pourquoi je devrais nettoyer des trucs que j'ai pas fait?
- c'est nul.
- c'est lamentable.
- D'abord, il n'y a même pas de craies.
Je m'énerve. Je leur dis : ce n'est jamais personne, dans votre classe, personne ne parle, personne ne casse rien, et bien sûr ça n'est pas l'un d'entre vous, c'est logique, mais vu votre comportement en classe, vous êtes collectivement responsables du bazar, et apprendre à supporter les erreurs des autres ce n'est pas grave, ça vous apprend la vie (je ne leur demande pas de se faire tabasser à la place des autres).
Bref, ils rentrent, deux ou trois ramassent les craies, et une fille, bavarde notoire, gentille mais très gênante en classe, ressort en me lançant un regard écoeuré, du type "les profs sont vraiment des grands malades" et me dit, avec sincérité : "Madame.. il n'y avait même pas de craies." L'idée qu'elle soit arrivé sur les lieux après le nettoyage par les élèves qui l'y avait précédé ne lui a même pas effleuré l'esprit. Il est beaucoup plus cohérent de supposer que le prof est dingue ou cherche seulement à les emm... gratuitement.
Un autre élève m'a dit bon week end en secouant la tête comme on le fait devant - les élèves, justement, en mode "c'est à peine croyable de voir ça....".
Or, cette classe est l'une des plus catastrophiques du collège, ils sont très gentils mais ils ne travaillent que très sporadiquement, et à la chiourme uniquement, le désordre y est constant, et aucune ne peut avoir un petit recul pour se dire juste "Bon, allez on ramasse les craies", c'est tout.
D'autre part, ils sont très vite persuadés qu'on leur ment; j'ai été obligé de leur faire constater plusioeurs faits devant témoins, pour le leur prouver. Pour des broutilles. Ex : Tu n'as pas mis ton nom sur la copie. - Si, madame. - Non, enfin, ce n'est pas très grave mais regarde. - Ah oui, c'est vrai.
Et une fois dehors, après avoir rajouté le nom au stylo : "Elle est tarée, elle a dit que j'avais pas mis mon nom, elle est dingue!" pour garder la face et jouer à "les profs sont tous des cons".
J'avoue : j'ai du mal à supporter cela. A chaud, je n'ai qu'une seule envie : les frapper. leur faire subir la même chose.
Aujourd'hui je suis plus calme et quand j'y réfléchis je ne vois là-dedans qu'une expression de la révolte adolescente. Solidarité et un sentiment de victimisation qui doit absolument s'exprimer. Donc, ne pas rentrer dans leur jeu. Je n'aborderai pas le sujet en classe, l'incident est clos, c'est-à-dire qu'il doit l'être, dans l'intérêt général, pour la pédagogie, parce que la vie ne doit pas s'arrêter à un mensonge d'enfants.